Branle-Bas-D'Enfants au Royaume de Tenkodogo: Le divorce en passe d’être consommé entre les KERE
Plein feux sur l'histoire de la Chefferie Coutumière du Royaume de Tenkodogo
Le 10 juin 2000, un digne fils de la famille KERE, le regretté KERE Mahamadou, notable de 58 ans, époux de quatre femmes et père d'une vingtaine d'enfants, aurait été sauvagement abattu par les enfants de feu Naba Tigré dans la cour royale de Tenkodogo. Cette bavure d'une certaine époque, a, comme il fallait s'y attendre, secoué tout le Boulgou en général et Tenkodogo en particulier et a provoqué du coup un grand émoi dans la famille KERE qui ne savait à quel saint se vouer. La suite de cette tragique affaire a contribué davantage à diviser les liens séculaires qui unissaient la famille KERE à celle des SORGHO.
Loin de nous l'idée de vouloir remuer un couteau dans une plaie déjà très béante,
mais comme les faits sont têtus, nous serons obligés d'en arriver là.
Faits historiques
L'histoire nous enseigne, que les Bissa ou encore les KERE sont au cœur de l'existence des Sorgho de Tenkodogo. Selon le grand père de Samandin Naba de Tenkodogo, le sieur KERE Oumarou, les premiers Mossis (c'est-à-dire les Sorgho) qui sont arrivés tout droit de Gambaga, se sont installés sous un arbre à la porte du pays Bissa et entre temps, ils avaient soif et ils ont envoyé un des leurs dans une famille Bissa(KERE) pour demander de l'eau à boire. Entre temps le Patriarche de la famille KERE s'est rendu là où ils se sont installés aux fins de comprendre la raison de leur présence dans la contrée. Ils ont répondu qu'ils étaient de passage et comme ils semblaient être esquintés, ils ont souhaité se reposer avant d'aborder la suite du trajet.
Et comme vous le savez, en pays Bissa, quand un étranger arrive, on lui offre de l'eau à boire et de l'arachide avant de lui préparer à manger. Les jours passaient et les étrangers d'un jour ne demandaient toujours pas à partir. Entre temps ils se sont déplacés dans un petit village appelé Zingoudin et c'est là-bas qu'il y a eu semble-t-il la nomination du premier Chef. Avant qu'ils ne se déplacent à Zingoudin, il y aurait eu un pacte de sang qui liait les deux communautés Mossi(Sorgho) et Bissa(KERE). En clair, cela veut dire qu'ils se sont entendus pour gérer la cité ensemble. Et c'est ainsi qu'ils ont vécu ensemble jusqu'à l'installation du Royaume de Tenkodogo. Pour donner le nom Tenkodogo à la ville, il a fallu organiser une grande fête où effectivement le Patriarche KERE et le représentant des Sorgho étaient assis côte à côte, et il ressort que c'est un vieux peulh qui a été sollicité pour baptiser la cité de Tenkodogo.
A la mort de Naba Sigri(le premier Chef de Tenkodogo), lorsque son successeur allait faire des sacrifices sur la tombe du Roi défunt, s'il partait avec deux poulets pour le sacrifice, le Samandin Naba allait aussi avec deux poulets. Et c'est ainsi que les KERE et les SORGHO ont vécu depuis la nuit des temps. En clair, c'est les KERE qui donnaient la Chefferie au SORGHO et à leur tour, eux aussi donnaient la Chefferie du Samandin Naba au KERE, c'est-à-dire le premier ministère du Royaume. En d'autres termes, ce sont les KERE qui commandent la cour Royale. Il est aussi vrai que le Roi commande Tenkodogo, mais il ne pouvait rien faire sans l'aval du Samandin Naba.
Et comme vous le savez, avec l'évolution du monde, les SORGHO ont fini par se rendre à l'évidence, que les KERE commençaient à s'accorder beaucoup d'importance et qu'à l'allure où vont les choses, il n'est pas exclu que les Bissa ou encore les KERE finissent par nommer un des leurs, comme Roi de Tenkodogo. A encroire le patriache KERE, cette idée n'est jamais passée par la tête des Bissa(KERE). A ce qu'on dit, petit à petit, les SORGHO ont commencé à ne plus accorder de l'importance au Bissa (KERE).
C'est ainsi que le Samandin Naba, un Bissa, qui est sensé être le Premier Ministre du Royaume de Tenkodogo, a été limogé au profit d'un SORGHO ou encore un Mossi, en la personne du Daporé Naba. Alors qu'il semble qu'en l'espèce, dans la tradition Mossi, le Daporé Naba ne s'occupe que des femmes du Roi. Malgré cette injustice, les Bissa ont continué à faire comme si de rien n'était. Et comme il fallait s'y attendre, la goûte d'eau qui fait déborder le vase, est sans conteste, l'assassinat de KERE Mahamoudou dans la Cour Royale ce 10 juin 2000 suite à l'intronisation du Chef de Loanga.
De l'intronisation du Chef de Loanga à la mort de KERE Mahamoudou
Naba Yemdé chef de Loanga à sa mort avait laissé derrière lui, plus de soixante enfants et quatre petits frères que sont Oscar, Raoul, Gabriel et Julien. Le dernier serait mort accidentellement sur la route de Fada N'Gourma. Raoul quant à lui, du vivant du Chef de Loanga, s'occupait de l'éducation des enfants de la famille, en somme de l'insertion sociale de ses neveux. Gendarme de son état, il a réellement su inculquer un savoir être aux enfants de son grand frère(Le défunt chef de Loanga). Aujourd'hui beaucoup de ses neveux travaillent dans la fonction publique.
C'est ainsi qu'à la mort de Naba Yemdé, ses enfants se sont réunis et ont décidé de façon démocratique de confier la chefferie à Raoul, car selon eux, leur père n'est autre que Raoul, car c'est bien lui qui s'est occupé de leur éducation et de leur insertion sociale. Pendant toute cette période, en aucun moment, le sieur Oscar, (militaire de formation) ne semblait être intéressé par la chefferie.
Etant choisi comme successeur de Naba Yemdé par la famille, les notables de Loanga ont jugé nécessaire de porter l'information à sa Majesté Naba Tigré, Roi de Tenkodogo. Arrivé sur place dans la cour royale bien sûr en présence d'Oscar, le Monarque sachant bien ce qu'il a dû orchestrer avec Oscar, a demandé aux notables de Loanga de porter trois fois leur Chef en guise de rite d'intronisation, c'est ainsi que Raoul fut soulevé trois fois devant le monarque, ce qui signifie que ce dernier est définitivement intronisé Chef.
Le groupe de Raoul qui n'était pas informé du coup qu'Oscar et le monarque ont orchestré, a fini par se rendre à l'évidence que le groupe d'Oscar a aussi soulevé leur mentor comme étant Chef de Loanga. Il faut être sincère pour reconnaître qu'effectivement, si le roi de Tenkodogo n'avait pas une idée derrière la tête, il n'aurait pas dû admettre introniser deux chefs de canton du même cercle en même temps. De notre point de vue, cela est inadmissible. Le roi en acceptant cette forfaiture, savait très bien ce qu'il faisait, mais à quelle fin ? Nous Le Messager N° 162 du Jeudi 31 Juillet 2014ne saurons en dire davantage. Du coup, la famille s'est retrouvée avec deux Chefs de canton. Etant mis devant les faits accomplis, le groupe de Raoul s'est déporté à Loanga et a continué avec leur cérémonial d'intronisation par les bons soins de Naba Konkobré, Samandin Naba de Tenkodogo lequel devait marquer l'intronisation officielle du Chef de Loanga.
Se sentant semble-t-il désabusé, le Monarque a envoyé des émissaires une nuit au domicile du Samandin Naba pour lui dire qu'il était convoqué par le Naba Tigré. Les épouses du Samandin Naba ont refusé à ce que leur mari réponde à une convocation nocturne et de surcroit, parcequ’elles ignoraient la raison fondamentale de cette convocation.
N'ayant pas répondu à la convocation du Roi, le monarque s'est déporté dans la même nuit au domicile du Samandin Naba, munis d'un fusil de chasse et d'un pistolet pour régler les comptes du Samandin Naba. Sachant de quoi le Roi est capable, le Samandin Naba s'est réfugié dans l'arrière chambre de sa cour pour éviter le pire. Il semblerait qu'il a fouillé la cour de fond en comble tout en prononçant des insanités à l'endroit du Samandin Naba et en l'intimant de sortir de sa cachette. L'autre n'ayant pas réagi, Il aurait fait ce qu'il devrait faire avant de regagner son palais royal à quelques encablures du domicile de Naba Konkobré, le Samandin Naba.
De commentaires en commentaires, le monarque fut faire convoquer le sieur KERE Mahamoudou, commerçant de ciment, dans sa cour royale. Arrivé dans la cour royale, ce qui devait arriver, arriva. Il aurait été ligoté et tué comme une bête sauvage. Suite à cet assassinat crapuleux, la communauté Bissa de Tenkodogo a réagi avec la dernière énergie. Pour éviter que la communauté Bissa et Mossi ne s'affrontent, une mascarade de jugement aurait été prononcé mais jusque-là et selon la famille KERE, l’affaire n'est pas encore close car avant de lever la séance, le président du Tribunal aurait laissé entendre que c'est la partie pénale qui a été tranchée et qu'il y aurait un autre jugement pour trancher le contentieux pécuniaire, mais à entendre toujours la famille KERE, ce jugement n'a pas encore eu lieu.
Un des doyens de la famille Royale, le sieur Sorgho Mathias avait souhaité en son temps, qu'il ne faille pas qu'à cause de cet incident malheureux, les liens fraternels qui unissaient les deux familles ne s'effritent, il a convoqué une rencontre avec les deux protagonistes afin de permettre au monarque de demander pardon à la famille KERE afin que les liens séculaires qui unissaient ces deux familles soient consolidés pour le bonheur de la population laborieuse de cette contrée.
A encroire le vieux KERE Oumarou, effectivement cette rencontre salvatrice s'est tenue en présence des émissaires du monarque et de ceux de la famille KERE afin de mettre un point final à cette crise sociale qui n'a que trop durée à Tenkodogo. Au sortir de ladite réunion, les émissaires du monarque ont fait un compte rendu fidèle au Roi et le dernier mot évidemment lui revenait. Peine perdue, car en guise de réponse, il aurait laissé entendre qu'il n'est pas question pour lui de demander pardon à la famille éplorée(KERE), et que de surcroit, un chien mossi vaut mille Bissa.
Comme vous allez vous en rendre compte, cette phrase a d'une manière ou d'une autre révolté la famille KERE. Suite à cette assertion, la famille KERE a jugé bon de casser définitivement les liens séculaires qui unissaient les deux communautés. Depuis cette date fatidique, les Bissa ou encore les KERE de Tenkodogo ont décidé donc de prendre leur destin en main en décidant de facto de la nomination de leurs chefs coutumiers par les bons soins de Naba Konkobré, Samandin Naba de Tenkodogo.
Comme vous le savez, le royaume de Tenkodogo compte six cercles dont Loanga, Yargtenga, Koabtenga, Wéguédo, Bissiga et Tenkodogo. A ce qu’on dit, il n'est pas exagéré de dire que les Bissa sont majoritaire dans cette contrée, car selon le vieux Oumarou, les Bissa occupent plus de 80% du territoire du royaume de Tenkodogo. A en croire une certaine source, il semblerait que la communauté Bissa de Tenkodogo est actuellement à pied d'œuvre pour recouvrer leur indépendance à tous les niveaux afin de pouvoir mieux gérer leur cité comme ils l'entendent.
Pour vérifier cette assertion, nous nous sommes déportés au domicile du monarque de Tenkodogo. Il est 10 h 15 mn ce 22 janvier 2014, quand nous mettions pied dans la cour royale. Juste devant le portail du roi, un jeune homme accouru nous intercepter pour demander l'objet de notre présence et humblement nous lui avons dit qu'on venait chercher à rencontrer le Roi. Il appela aussitôt un des sujets du roi qui nous a demandé de prendre attache avec un des ministres du royaume en la personne de Zoukougrou Naba.
A l'aide de notre téléphone, nous prenons effectivement attache avec ce dernier et il nous a demandé de l'attendre devant le palais. Arrivé, il nous a demandé de rencontrer le ministre de la jeunesse du royaume et que c'est le seul qui est habilité à nous mettre en contact avec le roi. Il nous conduisit aussitôt au terrain d'abattage où effectivement nous avons pu rencontrer ce dernier. Ce dernier n'est pas passé par plusieurs chemins pour nous dire qu'il n'est pas évident que nous puissions rencontrer le roi de cette façon et qu'il fallait qu'on prenne rendez-vous. Pour ce faire, il a pris notre contact en nous disant qu'il ne manquera pas de nous recontacter. Jusqu'à ce que nous quittions le royaume de Tenkodogo, nous n'avons pas été recontactés par qui que ce soit, pour les besoins de la cause.
A en croire une certaine source, tout ce qui se passe dans le royaume de Tenkodogo est instrumentalisé par des individus sans foi ni loi, afin de faire croire à l'opinion nationale que les Bissa ou encore les KERE de Tenkodogo ne s'entendent pas, alors qu'au fait, il n'en est rien. Au vu de ce qui précède, il est évident que tout est mis en œuvre pour diviser la communauté Bissa, mais à quelle fin, nous ne saurons en dire davantage.
De Tenkodogo dans le Boulgou, nous nous sommes déporté dans la commune rurale de Bané, afin de pouvoir décrypter ce qui s'y passe.
Que s'est-il réellement passé dans la commune rurale de Bané ?
Pour comprendre effectivement ce qui s'est passé à Bané, localité située à une trentaine de kilomètres au sud de Tenkodogo, entre le Colonel Wendwaoga KERE et son grand frère, sa Majesté Naba Sonré, chef de canton de Bané, nous avons décidé de prendre notre bâton de pèlerin pour rallier le canton de Koabtenga afin de comprendre avec exactitude le bien-fondé de cette crise qui n'a que trop durée dans cette partie du Burkina.
Il est 13h45 mn ce 22 janvier 2014, quand nous traversions la pancarte qui indique que nous sommes bien dans le village de Koabtenga. Une fois en ville, nous nous sommes dirigés vers la mairie de la localité afin de pouvoir échanger avec l'autorité communale, mais malheureusement on nous a laissé comprendre que le maire n'était pas sur place, c'est ainsi que nous avons été contraint de revenir sur nos pas.
Renseignements pris, on nous indiqua le domicile du chef de canton de Bané. Dans la cour du Chef, nous avons vu les notables du chef assis sous un hangar. Après les salutations d’usage, nous avons demandé à rencontrer les sages de la grande famille KERE. Comme il fallait s'y attendre, l'aîné de la famille KERE qui se trouve être le Nakoom Naba du chef de Bané, qui était présent sur les lieux, n'est pas passé par plusieurs chemins pour se prêter à nos questions. A la question de savoir, lequel des deux frères KERE est le chef légitime de Bané, il nous a laissé entendre que le chef légitime de Bané est sans conteste, le Naba Sonré à l'état civil, KERE Nébama.
Pour le Nakoom Naba de Bané, le Naba Sonré ne s'est pas auto proclamé chef de Bané. Selon lui, plusieurs réunions de famille se sont tenues à Loanga et à Bané pour désigner le successeur légitime du chef de Canton de Bané. Et à toutes ces différentes réunions, en aucun moment il n'a aperçu la silhouette du Colonel Wendwaoga KERE, malgré qu'il ait été toujours invité. Selon les sages de la famille KERE, à partir du moment où il n'a jamais répondu à aucune réunion de famille, personne ne pouvait imaginer qu'il était intéressé à la chefferie. C'est pourquoi la famille a estimé qu'il n'était pas logique de sa part, qu'après avoir désigné démocratiquement Naba Sonré comme chef de canton, que le Colonel Wendwaoga KERE vienne encore remettre en cause leur choix.
Du Nakoom Naba de Bané en passant par KERE Oumarou, KERE Amidou Lallé, Kam Naba de Bané, Daporé Naba de Bané, Malgré Naba de Bané et KERE Joseph, tous dans un même langage de vérité, ont réaffirmé que dans le Canton de Bané, ils ne connaissent aucun autre chef que la personne de NAba Sonré chef de canton légitime de Bané. Comme vous allez vous en rendre compte, c'est cette même farce qui s'est produite à Loanga entre Oscar KERE et l'actuel Chef de canton de Loanga, à l'état civil KERE Raoul, eux qui sont de surcroît du même père géniteur.
De retour de Tenkodogo, nous faisons escale à la Base Aérienne de Ouagadougou pour écouter la version des faits, du Colonel Wendwaoga KERE, qui dit être intronisé chef par le roi de Tenkodogo. Ce dernier nous donna donc rendez-vous à domicile aux confins de la cour de la Base Aérienne. Après les salutations d'usage, il demanda l'objet de notre visite que nous n'avons pas manqué de lui détailler. Sans langue de bois, il nous laissera comprendre qu'en sa qualité de militaire, il regrettait de ne pouvoir donner suite à nos questions, car selon lui, l'armée c'est la grande muette et que tout ce qu'il peut nous dire, c'est qu'il a été intronisé Chef par le roi de Tenkodogo. Ne voulant toujours pas répondre à nos questions malgré notre insistance, nous avons été obligés de quitter son domicile sans gain de cause.
Au détour de cette escapade, nous avons pu mesurer la gravité du problème, et si rien n'est fait pour contenir les ardeurs des uns et des autres, il n'est pas exclu que quelque chose de nature à mettre la paix sociale à rude épreuve dans cette partie du Burkina, ne se produise. Il est de bon ton, que l'autorité administrative, politique, religieuse, provinciale, régionale mettent les bouchées doubles pour éviter des cas malheureux supplémentaires dans cette partie du Burkina, car il y va de l'intérêt de tous.
Seydou DIABO
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