Le Messager

Le Pouvoir de la 4è république à la croisée des chemins

Il est incontestable qu’au Burkina Faso, autres fois pays des hommes intègres, aucune élection n’aura eu autant engouement que les élections municipales et législatives couplées du 02 décembre 2012. De ville en campagnes, le parti majoritaire ou encore le parti au pouvoir, le CDP fait face à des remous non négligeables en son sein.

 

Pour le commun des mortels, l’élection en démocratie normalisée, consolidée et apaisée, est un grand moment de saine émulation entre partis, entre compétiteurs politiques. Elle permet aux électeurs, organisés ou non, au vu des bilans des  élus sortants, de faire des nouveaux choix, ou de confirmer les anciens. Il est aussi important de signifier que l’élection en démocratie est une tribune privilégiée entre des militants et leur parti, des  militants qui doivent former un tronc commun  autour de leurs formations politique  en quête de sièges.

Au CDP (Congrès pour la Démocratie et le Progrès), les élections couplées de décembre  2012  ont été une occasion propice pour les militants et militantes  de  cette formation politique de s’adonner à   ce que l’on pourrait  appeler désobéissance civile. Un peu partout, ce sont des batailles rangées, des  actes de violences pour défendre le choix de tel candidat ou pour récuser celui de tel autre. De Matourkou à Bobo-Dioulasso en passant par   Boussouma, Tougan, Niankologo et nous en oublions,  c’est le même spectacle de militants en contestation, en dissidence de leur parti pour n’avoir pas eu gain de cause.

Les partis politiques sont les acteurs au premier chef de l’enracinement démocratique, pour peu que les gouvernants créent les cadres adéquats d’expression démocratique. Quand on voit des  militants d’un même parti se battre parfois  à mort pour des postes électifs, rejoindre les rangs d’autres partis plus regardants sur leur demandes, ou quand on se trouve en présence de villages ayant décidé de faire la grève des élections et d’interdire des visites de partis, il faut accepter que  le mal est profond au pays des hommes autrefois intègres. Nous avons toujours en mémoire ce qui s’est passé dans un village rattaché de Bobo-Dioulasso, ou un militant de l’ADF/RDA a été copieusement battu au seul motif que ce dernier n’avait le droit d’envoyer un autre parti autre que le CDP dans le village. Ha!!! Politique, quand tu nous tiens.

 La 4e république a certainement gagnée la bataille de la stabilité. On peut en contester le prix, mais les faits sont là.  Cependant, lorsque la stabilité conduit à un tel émoussement de l’affiliation partisane,  à une telle érosion des valeurs citoyennes et démocratiques, c’est que l’état maître d’œuvre de la construction démocratique a failli à son devoir. En fait, les troubles et faits de  violences multiples que nous observons à quelques encablures des élections, ne  sont que  la continuation des manifestations de rejet de l’ordre public national, des  institutions (  et des hommes  qui en sont l’incarnation ),  en œuvre depuis 2011, à la suite de la mort de  l’élève  Justin Zongo. Nous  devons y voir une invite sérieuse  à mieux soigner la dynamique de réforme nationale, car en ratant notre processus d’institutionnalisation, comme on le constate de nos  jours, nous mettons la république en danger.

Il est vrai que  les  9/10 de cas  concernent le parti au pouvoir et ses  dirigeants, mais l’impact de cet affaiblissement, des ressorts républicains,  concerne tous les partis, tous les burkinabé; et au moment où la question de la sécurité nous sollicite, de façon lancinante et angoissante, avec le drame malien, prenons garde à ne pas laisser davantage sombrer l’autorité de l’Etat. Et comme nous l’avions si  bien dit, il est grand temps que les choses reviennent à la normale avant qu’il ne soit trop tard.

 

Seydou DIABO

 



06/12/2012

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